vendredi 12 octobre 2012

Dossier sur le lynx boréal



LE LYNX BOREAL
                      
Le lynx Boréal est un animal encore méconnu en France, surtout en comparaison des autres grands prédateurs que son le loup et l’ours. Ce dossier est fait pour apprendre à propos de ce félin en ces temps où il fait la une de l’actualité animalière bien malgré lui. Outre un descriptif sur l’animal à proprement parler ;  sa situation en France, sa relation avec l’homme et  sa protection seront également abordés. Nous espérons que cet article vous aidera à mieux comprendre les enjeux autour du lynx à l’heure où son avenir dans nos forêts se décide. Un lien vers une pétition pour soutenir un plan de conservation à l’échelle nationale est disponible à la fin de l’article. Bonne lecture….


Qui est-il ?

Le lynx boréal, appelé aussi lynx eurasien et loup-cervier (vieux français) est l’une des quatre espèces de lynx avec le lynx roux, le lynx canadien et le lynx pardelle. C’est le plus gros de toutes ces espèces et le plus grand félin d’Europe. Son nom scientifique est Lynx lynx. Il mesure entre 50 et 75cm au garrot et pèse de 13 à 35 kg

 
Vidéo de lynx dans la neige où l'on peut bien les observer



Ou vit-il ?

On le trouve aujourd’hui sur la majeure partie du territoire Russe ; il vit aussi en Mongolie et au Kazakhstan. Il occupe également presque la moitié du territoire chinois, ainsi que l’extrême nord de l’Inde et le Népal (Himalaya). Le Kirghizstan, l’Ouzbékistan et l’Afghanistan ont également la chance de l’accueillir.  Il est présent dans quasiment toute la Scandinavie tandis que les populations en Europe de l’Ouest et en Turquie/Iran sont très dispersées. C’est à cause de cette dispersion que son avenir dans ces pays est incertain.
Il occupait autrefois la majeure partie de l’Europe, de la péninsule ibérique jusqu’aux Balkans en passant par le nord de l’Italie. On le trouvait également dans tout le Caucase et même en Corée et au Pakistan. Dans certains pays comme la Slovaquie, la République tchèque, la Roumanie, la Pologne et  les pays scandinaves, il est passé proche de l’extinction avant de reconquérir des territoires.   

Trouvez ici une carte dynamique actualisée très bien faite de l’aire de répartition du lynx : ICI


Mode de vie

Habitat
Le lynx est un animal solitaire qui vit en forêt. Il est actif surtout la nuit, principalement au crépuscule et à l’aube. Il peut être actif en journée quand la nourriture devient rare ou quand une femelle s’occupe de ses petits. Pour se reposer, il apprécie les cavités rocheuses ou encore des enchevêtrements d’arbres tombés à terre pour être à l’abri des regards. Il est adapté pour vivre dans la neige grâce à ses pattes très large, toutefois, il est en difficulté si la couche de neige dépasse un mètre et délaissera ces zones trop enneigées.

                                

Territoire
Le lynx est un félin territorial.  Le territoire d’un lynx mâle superpose celui de plusieurs femelles. Sa taille varie largement en fonction du nombre de proies disponibles. Les plus petits territoires observés mesuraient 20 km² (Carpates) alors qu’un lynx du nord de la Suède disposait de  2000 km², ce chiffre reste exceptionnel, 450 km² étant déjà un très grand territoire. En France, on estime qu’un lynx mâle a un territoire de 250 km² contre 130 km² pour une femelle. Les lynx marquent leur territoire en laissant des signaux odorants. Leur odorat très développé n’intervient que très peu lors de la chasse mais sert à la communication entre individus. Deux lynx préféreront s’éviter plutôt que s’affronter.  Il arrive que certains lynx délaissent leur territoire pour suivre une migration de proie ou pour chercher une partenaire.

Se nourrir
Le lynx chasse des ongulés de taille moyenne, des lièvres, des lapins, des rongeurs mais aussi des carnivores comme les renards ou les mustélidés (fouine, martre…). En France, chevreuils et chamois sont ses proies favorites. C’est un bon chasseur, il s’approche lentement de ses proies pour les attraper par surprise. Ce n’est pas un adepte de la poursuite et arrêtera sa course après quelques dizaines de mètres si la proie s’enfuit. Il peut également attendre sur la piste d’une proie pour lui tendre une embuscade lorsqu’elle passera. Le lynx a besoin de 1 à 1.5 kg de viande par jour. Lorsqu’il a tué une grosse proie, il peut la cacher sous la végétation ou sous la neige et reviendra la consommer plus tard s’il n’est pas dérangé. Contrairement aux autres félins qui aiment avoir les pattes postérieures au sol lorsqu‘ils attrapent une proie, il semblerait que le lynx préfère bondir sur elles.

                                
                                                     Cette vidéo intitulée à tort « aggressive lynx » donne une bonne idée de leur agilité

Reproduction
Lors de la saison des amours, les lynx donnent de la voix pour se localiser. D’habitude plutôt silencieuse (bien que capables d’émettre une dizaine de vocalisations) la femelle laisse entendre une sorte de miaulement rauque répété une douzaine de fois suivi d’une pause avant de répéter la séquence. Les appels du mâle sont plus rauques et plus profonds. L’accouplement est bref mais répété plusieurs fois, le mâle attrapant la femelle par la peau du cou. La femelle donnera naissance à une portée de 1 à 4 petits après une gestation d’environ 70 jours. Les jeunes lynx se développent plus lentement que les autres félins, ils ouvrent les yeux entre 10 et 12 jours et commencent à manger de la nourriture solide vers 6 ou 7 semaines. La famille quitte la tanière de naissance quand les jeunes ont 2/3 mois et ils ne seront sevrés qu’à 4,5 mois. Ils continueront de suivre leur mère pour apprendre jusqu’à la prochaine saison des amours lorsqu’ils auront environ 10 mois et seront aptes à être indépendants.

     
 Regardez cette super vidéo d’une femelle qui élève ses petits : ICI

 
jeunes lynx qui jouent


Situation en France

Présent partout en France au XVe siècle, le lynx a disparu du territoire français dans les années 1920. Il a auparavant été séparé en différentes populations qui ont disparu les unes après les autres : dès le XVIIe dans les Vosges, à la fin du XIXe dans le Massif central et le Jura pour s’éteindre dans les années 20 dans les Alpes et les Pyrénées.
Il a recolonisé la France dans les années 1970. Le Jura et les Alpes ont été colonisés naturellement à partir de la Suisse  (populations issues de lynx relâchés sur le Territoire Suisse) tandis qu’il a été réintroduit dans les Vosges avec des individus provenant des Carpates (21 individus entre 1983 et 1993).
Aujourd’hui, il existe 3 populations de lynx différentes :
- la population jurassienne est celle qui a connue le plus de succès. Le territoire du lynx s’étend désormais à l’Ain, le Rhône et le Doubs. La population est estimée à une centaine d’individus.
-   la population des Vosges compterait vingt à trente lynx, principalement sur le versant alsacien. Toutefois, il semblerait que le lynx colonise peu à peu le versant lorrain.
- la population des Alpes est malheureusement assez dispersée sur l’ensemble du massif ce qui empêche cette population d’être dynamique. De plus, cette population ne dépasserait pas 22 individus.
La jonction entre 2 populations serait extrêmement bénéfique. Plus le territoire du lynx est grand  et continu, plus il y a de brassage génétique. Les importantes ruptures de continuité dans les milieux forestiers (infrastructures humaines) rendent difficile une jonction des populations vosgienne et jurassienne au niveau de la Haute-Saône et celle des populations jurassienne et alpine dans les pré-alpes du nord.


Pour plus de détails : La situation du lynx en France : bilan 2002-2004 par l’ONCFS     ICI
ou sur la fiche lynx du site internet du pôle grands prédateurs     LA


Le lynx et l’homme

Les rencontres entre l’homme et le lynx sont peu nombreuses car c’est un animal très discret, l’apercevoir est une chance inouïe. Son comportement à la vue d’un homme est révélateur : dans la plupart des cas il observe calmement, sans chercher à s’enfuir, analyse la situation puis disparaît dans la végétation quand il en a assez vu. Le lynx n’attaque jamais l’homme : après enquête, les quelques cas reportés se sont révélés être une supercherie.
Le panel des relations entre l’homme et le lynx est très majoritairement à la défaveur du lynx. Outre le déboisement, la construction de routes ou de voies ferrées coupe son territoire et se risquer à traverser peut être très dangereux : les jeunes, moins expérimentés sont les principales victimes de collisions. De plus, cette fragmentation de son habitat isole les lynx ou les populations de lynx les un(e)s des autres et contribue à l’appauvrissement génétique de l’espèce.

Le lynx attaque rarement des animaux d’élevage et lorsque que cela arrive, il s'agit le plus souvent de moutons. La plupart des cas démontre cependant un manque de protection de la part des éleveurs. Un cas d’actualité est particulièrement symbolique : un éleveur bénéficiant de subventions pour protéger son terrain des prédateurs se retrouve indemnisé après des attaques sur une parcelle...non protégée !! Après en avoir bien profité, cet éleveur accompagné du lobby de la chasse fait pression pour avoir la peau du lynx…
A lire : le communiqué de l’association Athénas sur  l’affaire des moutons de Mirebel et sa gestion par l’Etat. Révoltant !ICI

Le braconnage est une cause non négligeable de la mortalité de lynx. L’ignorance, le trophée ou la vengeance dictent ses actes. Vengeance, haine, ces termes semblent appropriés tant certains semblent en vouloir au lynx. On l’accuse de tous les maux et le pouvoir du lobby lui fait mauvaise presse. La valeur des arguments brandis par les ennemis du lynx est pourtant bien faible ou plutôt diffamatoire :
« Il nous vole notre gibier ». Si quelqu’un est légitime à chasser les ongulés dans nos belles forêts est-ce le lynx ou les chasseurs ? De plus, une étude menée en Suisse dans les années 90 montre que les populations de lynx tuaient 6 000 ongulés par an pour se nourrir contre 40 000 pour les chasseurs et 15 000 pour les collisions routières.
« Il attaque nos bêtes d’élevages ». On attribue au lynx une cinquantaine d’attaques par an, surtout concentrées dans le massif du Jura. Ces attaques ont lieu quand l’élevage est dans la forêt ou mitoyen de celle-ci. Il existe des subventions pour se donner les moyens d’éviter ça (chiens, clôtures,  abris nocturnes). Un prélèvement de l’animal est aussi envisageable mais ne constitue qu’une solution à court terme, une parcelle non protégée risque d’attirer de nouveaux prédateurs.
« Il y a trop de lynx, il faut les réguler ». Hormis le fait qu’une population de prédateur se régule elle-même (trop de prédateur & plus de proie => extinction de l’espèce), une étude commanditée par les chasseurs pour évaluer le nombre de lynx a conclu bien malgré ces derniers que les populations de lynx étaient encore fragiles.
A lire la réaction du collectif grand prédateur (on y lit certaines déclarations officielles de chasseurs notamment) : ICI


Protection du lynx en France

Heureusement, le lynx a aussi des amis. Plusieurs associations sont engagées à sa défense. Les associations ATHENAS, FERUS et le pôle grands prédateurs sont les plus célèbres et les plus actives. Sensibilisation, études diverses, batailles juridiques et protection d’élevage sont les fers de lance de ces associations. Lorsque c'est nécessaire, Athénas recueille également des jeunes lynx en difficulté qui ne pourraient survivre dans la nature (mort de la mère, difficultés à se nourrir). Après un protocole de réhabilitation, ces lynx sont relâchés dans la nature équipés de balises GPS pour suivre leurs mouvements. Ces études permettent d’en savoir plus sur le lynx pour mieux le protéger.

Pour mieux comprendre le lynx, il existe un réseau lynx géré par l’ONCFS. Toute information sur des indices de sa présence (excréments, carcasse de chevreuil, contact visuel…) peut être transmise au réseau. Le réseau édite un bulletin pour suivre l’actualité du félin et en savoir plus sur lui. Retrouvez tous ces bulletins  ICI
En France, le lynx est protégé par la loi sur la protection de la nature mais un certain lobby malheureusement très puissant aimerait changer les choses. Malgré la fragilité des populations (faible effectif, fragmentation), il n’a jamais existé de plan de sauvegarde de l’animal à l’échelle nationale alors que le loup et l’ours font objet d’un plan de la part de l’Etat soutenu par les acteurs associatifs. La récente activité autour du lynx rend la création d’un plan de sauvegarde plus que nécessaire et urgente. Les associations de défense du lynx appellent à cette création et font circuler une pétition à signer par toutes les personnes favorables au lynx.




Enjeux

Les enjeux de ce plan sont les suivants :
-  favoriser la jonction de différentes populations de lynx par la création de corridors biologiques
-  lutter contre la mortalité par collisions routières ou ferroviaires
- lutter contre le braconnage
- mettre en place une politique de prévention générale vis-à-vis des élevages
De plus, cela donnerait indéniablement plus de marge de manœuvre pour les initiatives favorables au lynx. Espérons que ça pourrait réduire la portée de la voix de ceux qui ne voit dans le lynx qu’un trophée ambulant.

EN BREF, IL Y VA DE L’AVENIR DE CE SUPERBE FELIN DANS NOTRE PAYS

SI VOUS PENSEZ QUE LE LYNX A SA PLACE DANS NOS FORETS, SOUTENEZ LA DEMANDE DE PLAN DE CONSERVATION, PRENEZ 2 MINUTES POUR SIGNER CETTE PETITION.   MERCI POUR EUX....


                  
                                            Ci-dessus : premier signataire de la pétition


Liens
Etude de l’association Kora en Suisse : Dispersion et survie des Lynx (Lynx lynx) subadultes d'une population réintroduite dans la chaîne du Jura http://www.kora.ch/pdf/reports/rep4_f.pdf

Document de l’ONCFS : Caractérisation de l’habitat à partir de données de présence : le cas du lynx dans les Vosges
http://www.oncfs.gouv.fr/IMG/file/mammiferes/carnivores/grands/rs07_basille.pdf

Association Athénas
www.athenas.fr

FERUS

ONCFS (Office national de la Chasse et de la Faune Sauvage)








                                                                              Grégory LEGRAND pour THEMISELVA

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